Biographie
L’art de Giannis Mitarakis, profondément enraciné dans les courants de l’avant-garde européenne, porte des traces marquées du fauvisme et de l’expressionnisme, tandis que son langage visuel unique a capté avec une sensibilité inégalée le paysage et la lumière de la Grèce. Tout au long de sa carrière, il n’a pas cherché seulement à représenter le monde extérieur, mais aussi à en saisir les dimensions internes et psychologiques.
Mitarakis est né à Alexandrie, en Égypte, et a passé son enfance en Grèce. En 1915, il acheva ses études secondaires à Chios, puis partit pour Paris, où il étudia d’abord l’Agronomie à l’Institut renommé de Grignon. Cependant, sa nature artistique prit le dessus sur ses études scientifiques, et en 1921, il se tourna résolument vers la peinture. Il étudia à l’Académie d’André Lhote, l’un des maîtres du cubisme, ainsi qu’à La Palette, auprès de Le Fauconnier. Là, il entra en contact avec les courants les plus progressistes de l’art parisien, tout en voyageant et peignant abondamment. Ses premières œuvres, principalement des paysages et des nus, furent exposées dans des salons prestigieux comme le Salon d’Automne et le Salon des Indépendants, révélant son intérêt précoce pour la forme et la couleur comme moyens d’expression émotionnelle.
En 1929, il quitta Paris pour s’installer à Athènes, où il présenta sa première exposition à la Galerie Stratigopoulou. Rapidement, il commença à parcourir la Grèce, immortalisant avec son pinceau les paysages de Mégare, de Santorin, de Chios et de Mykonos. Dans les années 1930, il s’imposa comme l’un des peintres les plus importants de Grèce. Il devint membre du groupe d’avant-garde « Groupe d’Art », et sa renommée dépassa les frontières grecques. Son œuvre fut exposée à la Biennale de Venise en 1936 et en 1940, tandis qu’en 1939, il représenta la Grèce à l’Exposition Universelle de New York, marquant une étape importante dans sa reconnaissance internationale. La même année, il reçut un prix à l’Exposition Panhellénique.
La Seconde Guerre mondiale interrompit temporairement son parcours artistique. Mitarakis fut mobilisé et combattit sur le front albanais, tandis que pendant l’Occupation, il vécut dans sa propriété à Chios. Les difficultés de l’époque ne mirent pas fin à son dialogue intérieur avec l’art ; au contraire, son expression artistique devint encore plus intense et tourmentée. Dans l’après-guerre, sa peinture évolua vers un expressionnisme encore plus dynamique. Ses couleurs fauvistes gagnèrent en intensité et en charge émotionnelle, donnant à ses œuvres un mouvement intérieur vibrant. En 1958, il représenta la Grèce aux Biennales d’Alexandrie et de São Paulo, et la même année, il participa au concours international Guggenheim à New York, aux côtés des plus grands artistes grecs. Ses œuvres furent exposées dans six grandes villes américaines, confirmant ainsi sa portée internationale.
L’œuvre de Mitarakis se caractérise par un dialogue explosif entre couleur et forme. D’un côté, il puise dans le fauvisme, adoptant des teintes audacieuses et pures qui traduisent la tension intérieure du paysage. De l’autre, sa formation au cubisme lui confère une approche structurelle solide. Au fil du temps, son langage visuel acquiert une plus grande liberté ; ses formes deviennent plus fluides, ses coups de pinceau plus dynamiques, comme s’ils cherchaient à s’affranchir des limites mêmes de la toile. Ses paysages ne sont pas de simples représentations de l’espace, mais de véritables topographies émotionnelles, imprégnées d’énergie, où la lumière et la couleur sont les véritables protagonistes de la composition.
Mitarakis s’éteignit en 1963, laissant derrière lui un héritage artistique inestimable. Son importance fut reconnue à titre posthume, notamment avec une grande exposition rétrospective en 1992 au Centre des Arts de la Municipalité d’Athènes et à la « Galerie 3 ». Aujourd’hui, ses œuvres figurent dans des collections majeures, prouvant que sa contribution à la peinture néo-hellénique reste intemporelle. Giannis Mitarakis fut un artiste qui ne se contenta pas d’une simple représentation de la réalité. Sa peinture était une quête de la lumière intérieure, une tentative de capturer l’essence profonde du monde à travers la puissance de la couleur et de la forme.
Georgia Dimopoulou
Classicienne – Éditrice
Source : Les informations de ce texte proviennent du catalogue de l’exposition rétrospective de peinture de Giannis Mitarakis, publié par la Fondation Culturelle de la Banque Nationale de Grèce, Patras, 2001.