Biographie
Pavlos Samios est né à Athènes en 1948. Son père, cordonnier, confectionnait d’élégantes chaussures pour femmes, et le jeune Pavlos, dès son enfance, l’aidait dans l’atelier. Il dessinait avec précision les chaussures, « transposant » le savoir-faire de son père en croquis détaillés—une initiation silencieuse mais essentielle au monde de la forme, de la composition et de l’art. L’odeur du cuir, le son des outils, la minutieuse mise en forme des courbes et des lignes laissèrent une empreinte indélébile dans sa mémoire, influençant plus tard sa peinture.
Dès son plus jeune âge, Samios fut fasciné par la peinture religieuse, avec ses couleurs sacrées et son éclat métaphysique. À quatorze ans à peine, il peignait déjà des icônes byzantines, s’imprégnant des secrets de cette tradition millénaire. Formé auprès de Dionysis Karousos, il commença à maîtriser les techniques de l’iconographie. Pourtant, son parcours ne se limiterait pas à la tradition ; son esprit inquiet cherchait de nouveaux moyens d’expression artistique.
D’abord élève de Panos Sarafianos, il poursuivit ensuite ses études à l’École Supérieure des Beaux-Arts d’Athènes, où il eut pour maîtres deux des plus grands peintres grecs du XXᵉ siècle : Nikos Nikolaou, qui lui transmit une profonde admiration pour l’art grec antique, et Yannis Moralis, qui l’initia aux recherches esthétiques de la peinture moderne. L’influence de Yannis Tsarouchis fut également déterminante. Ce dernier, qu’il rencontra à Paris, était un maître dans l’art de marier le passé artistique grec avec le présent, et il aida Samios à comprendre que l’hellénisme n’était pas un obstacle, mais une source d’inspiration.
Pendant ses années d’études, Samios fréquenta le cercle intellectuel légendaire de la « Flûte Enchantée ». Aux côtés de Manos Hadjidakis, il vécut des soirées d’intense effervescence intellectuelle, où les discussions allaient de la philosophie grecque antique à la poésie moderne, des traditions populaires aux courants avant-gardistes de l’art. Hadjidakis l’encouragea à penser sans limites, à explorer de nouvelles perspectives créatives.
En 1978, Samios s’installa à Paris. Il arriva confiant, enthousiasmé par le succès d’une récente exposition en Grèce. Mais la réalité parisienne fut rude. Confronté à une scène artistique nouvelle et exigeante, il travailla avec passion, déterminé à trouver sa propre voix dans un environnement à la fois exigeant et stimulant. Cette expérience le fit mûrir. Ses tableaux commencèrent à se teinter d’une atmosphère singulière, où la lumière byzantine cohabitait avec un langage plastique contemporain. Des thèmes tels que les cafés, les figures féminines et les fragments antiques acquérirent une profondeur nouvelle. Ses œuvres devinrent des poèmes visuels où mémoire et imagination s’entrelacent de manière indissociable.
En 1985, un incendie détruisit son atelier, anéantissant une grande partie de son œuvre. Pourtant, de cette destruction naquit une nouvelle liberté. Plutôt que de tenter de recréer ce qu’il avait perdu, il laissa le passé derrière lui et recommença, avec plus d’audace et de spontanéité.
En 1992, après quatorze années à l’étranger, Samios rentra en Grèce. Son retour insuffla à sa peinture une intensité nouvelle. Ses couleurs devinrent plus lumineuses, ses compositions plus audacieuses. Ses figures féminines, à la fois maternelles et sensuelles, dégageaient une chaleur qui faisait vibrer la toile de vie. Parallèlement, à partir de 2000, il enseigna à l’École Supérieure des Beaux-Arts d’Athènes, où il transmit les techniques de la fresque, de la peinture byzantine et de la miniature. Pour Samios, l’art n’était pas seulement une expression personnelle, mais aussi une responsabilité : la tradition devait rester vivante à travers la transmission du savoir.
Au cours de sa carrière, il réalisa plus de soixante-dix expositions personnelles. Ses œuvres, imprégnées de souvenirs, revisitaient les symboles de sa vie : les chaussures élégantes, les femmes, les cafés, la mer.
Le 4 février 2021, Pavlos Samios s’est éteint. Mais son œuvre demeure. « Peut-être est-ce pour cela que je peins. Pour laisser quelque chose derrière moi. » Et en effet, il a laissé derrière lui un monde entier—un monde grec, lumineux, unique.
Georgia Dimopoulou
Classicienne – Éditrice
Source : Les informations et le matériel photographique de ce texte proviennent du site officiel de Pavlos Samios et du “Samios Documentary”, réalisé par Maria Giannouli.