Biographie
Christos Kapralos est né en 1909 à Panaitolio, Agrinio. Issu d’une famille pauvre d’agriculteurs, il s’est élevé au-dessus des conditions difficiles, révélant la force indomptable de son âme artistique. Dès son plus jeune âge, ses premières rencontres avec l’art se sont faites à travers les peintres d’icônes de la région, tandis que son déménagement à Athènes en 1928 a marqué le premier pas important vers sa carrière en peinture et sculpture. Il a étudié à l’École des Beaux-Arts d’Athènes de 1930 à 1934, soutenu financièrement par la famille Papastratos.
Bien qu’il se soit initialement concentré sur la peinture, sa passion pour la sculpture l’a conduit à Paris, où il a étudié dans les prestigieuses académies Colarossi et Grande Chaumière, sous la direction de Marcel Gimond. Là, Kapralos a été profondément influencé par la tradition des grands sculpteurs français comme Maillol et Bourdelle. Cependant, il a toujours maintenu une forte connexion avec son héritage grec, l’art archaïque étant une source constante d’inspiration.
Avec le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale en 1940, Kapralos est retourné en Grèce. Après avoir séjourné un moment chez Moralis,[1] il est retourné dans son village natal en disant : « Je suis allé dans mon village avec des valises vides pour continuer. »[2] Là, l’isolement dans la campagne grecque et le contact étroit avec la nature ont façonné son œuvre. Kapralos saisit l’essence des choses et les rend avec des volumes équilibrés, sans ombres marquées.[3] Les œuvres de cette période reflètent la vie quotidienne des gens ordinaires, tandis que ses sculptures emblématiques, inspirées par la figure de sa mère, dépeignent l’essence humaine avec une simplicité primordiale.
En 1946, Kapralos s’est installé définitivement à Athènes, entamant une carrière artistique impressionnante. Sa première exposition personnelle au Parnassos la même année a marqué le début de la reconnaissance de son œuvre, caractérisée par la force des formes, l’équilibre des volumes et la quête de l’éternel et de l’universel. En 1951, son déménagement décisif à Égine lui a offert l’environnement idéal pour sa créativité. Là, il a réalisé des œuvres monumentales comme le Monument du Pinde, une frise en relief de 40 mètres de long célébrant l’histoire et la tradition grecques, inspirée des motifs archaïques et populaires.
Le thème central de la sculpture de Kapralos est l’Homme. Le corps humain, dans toutes ses manifestations, devient à la fois instrument et œuvre d’art, avec comme seul autre élément vivant le cheval, symbole divin archétypal de force dans la mythologie grecque antique. À partir des années 1960, Kapralos s’est tourné vers de nouvelles techniques, comme les œuvres en feuilles de cuivre, et a développé une méthode unique de traitement des feuilles de cire. Cette transition l’a conduit à des expressions plus abstraites mais tout aussi dynamiques, tout en conservant une connexion avec la forme humaine, la mythologie et la nature.
Sa participation à des expositions internationales, telles que les Biennales de Venise et de São Paulo, lui a valu une reconnaissance mondiale. Notamment, en créant sa propre fonderie avec l’aide de son ami Kostas Klouvatos, il a produit 240 formes, dont certaines ont rencontré un grand succès à la Biennale de Venise en 1962.[4] En 1981, la Galerie Nationale a honoré son œuvre par une exposition rétrospective, mettant en avant les sculptures en bronze de la période 1960-1980. Comme l’a noté D. Papastamos dans le catalogue de l’exposition, les formes de Kapralos transmettent une intériorité dérivée des êtres de la nature, ajoutant plus tard que sa transition vers des figures plus abstraites reflète la quête de l’unique vérité, valable tant que l’humanité existera.[5]
Kapralos était un artiste qui combinait une compétence technique avec une perspective profondément humaniste. Son œuvre, enracinée dans l’antiquité mais tournée vers une vision universelle, nous a légué un héritage spirituel et artistique qui reste vivant et pertinent. Elytis a écrit que Kapralos avait la capacité d’harmoniser le mouvement de ses mains avec le rythme de la matière dans la lumière et l’histoire de sa patrie.[6] Sa mort en 1993 a marqué la fin d’un cycle créatif plein de lumière, laissant derrière lui un art qui touche à l’éternité.
Georgia Dimopoulou
Classicienne – Éditrice
[1] Kapralos, C., Autobiographie, Agra, Athènes, 2001, p. 68.
[2] Frantziakakis, K. F., « Christos Kapralos répond à dix « si » », Zygos, 1981, p. 32.
[3] Palioura, Mirka, « L’œuvre de Christos Kapralos dans sa terre natale » dans Galerie de sculptures Christos Kapralos, Agrinio, p. 31.
[4] Lambraki-Plaka, Marina, « Christos Kapralos – Un sculpteur moderne aux racines anciennes » dans Yiannis Moralis – Christos Kapralos : Une amitié de vie et d’art, Fondation Stavros Niarchos, Athènes, 2016.
[5] Papastamos, D., Christos Kapralos – Sculptures en bronze 1960–1980, Galerie nationale – Musée Alexandros Soutzos, Athènes, 1981.
[6] Elytis, O., Papiers ouverts, Ikaros, Athènes, 2009, p. 455.